LE GASCON : DE L’ANALYSE RÉGIONALE A L’ANALYSE LINGUISTIQUE : GRAMMAIRE DE PROPRIÉTÉS D’ÉTATS DIALECTAUX par Jean-Louis Fossat
Les langues historiques du monde , romanes ou non, présentent pour les Sciences du Langage en général un gisement exceptionnel, soumis à méthodes d’analyse régionale, avant d’être l’objet d’analyses linguistiques approfondies qui ont pour objectif d’élaborer une grammaire de propriétés des états dialectaux qui sont fondée à la fois en théorie des sciences du lagage et en terme d’analyse régionale des activités langagières réparties dans l’espace : la dimensionalité du problème est triple et les solutions relèvent d d’une imbrication d’ordres : l’ordre des grammaires, l’ordre, historique et diachronique, de la temporalité ; et l’ordre de la spatialisation (étalement).. Si la description limitée se fonde toujours en 2010, sur le gascon, c’est pour une raison simple : c’est en raison de l’avancement des savoirs sur sa grammaire de propriétés, due à l’œuvre entière de Jean Séguy (Séguy 1973). Mais on conviendra sans déraisonner que le gascon ne constitue qu’un des extrêmes d’un ensemble occitan, à sa périphérie aquitanique ; d’autres extrêmes peuvent faire problème, à l’est alpin de contact ligure (Dalbéra 1973 ; 1994), comme au nord du domaine occitan (domaine arverne et domaine limousin), et aux franges des systèmes dits franco-provençaux de France et Italie du Nord. Tous les subsystèmes en hypothèse de diasystème, posent des questions de constituance, liés à la question des conditions de leur émergence historique, de la Ligurie à la Grande Aquitaine (Aquitania I, Aquitania II). Ma position sur ce problème est claire ; j’accepte d’abord, en premier lieu, de penser que l’objet de nos préoccupations, est, par convention, ce que tout le monde appelle ici béarnais historique, là gascon historique ; ceci ne repose pas sur mes croyances, qui ne présentent aucune sorte d’intérêt ; mais sur le constat fait par l’histoire constituante des corpus de textes gascons et béarnais d’écriture juridique, non artistique, inventoriés, mis en traitement exploratoire, dans un dispositif exploratoire de comparaison lexicographique et syntaxique. Posons en principe que la problématique de l’écriture artistique (en prose ou versifiée), pose des problèmes spécifiques, qui gagnent à être constitués en domaine séparés, comme ils le sont de fait Par conséquent dans un dispositif exploratoire et à première phase, il est parfaitement recommandable d’isoler les distributions des processus en domaine constituance de la grammaire pat états dialectaux du gascon-béarnais. A condition de penser aux confins languedociens du gascon ; tout comme à une autre échelle, la représentation des distributions décrites de l’occitan, rencontrerait immanquablement la carte distributionnelle des processus et faits distributionnels de type français, - et ceci non exclusivement au nord extrême du domaine occitan. Parmi ces langues historiques, le complexe linguistique gascon, voisin du béarnais, ou, comme on dit parfois le gascon-béarnais, en même temps que du basque, mais en même temps voisin direct du languedocien occidental (haut-languedocien, languedocien central), a, de longue date, attiré l’attention de philologues (G. Rohlfs), de lexicographes et lexicologues (Lévy, Raynouard, Walter von Wartburg, K. Baldinger), de dialectologues (Bourciez, Sacaze, Luchaire, Lalanne, Séguy), de grammairiens (Ronjat, Bouzet). On insistera principalement sur des faits à distribution nettement et clairement établies, prenant appui directement sur les représentations cartographiques de ces distributions, à l’exclusion de toute réduction synthétique de vulgarisation . La formule que nous utiliserons par conséquent prend la forme lapidaire du rapport d’existence attestée, datée, localisée : « en mains la carte de distributions N° xxx, nous sommes en présence de … ». Il fallait, pour s’en tenir à cette formule, à la fois un outillage et une prise de position théorique. Concernant modèles et théories en matière de Sciences du Langage, ainsi que l’adoption d’hypothèses, force est de constater une division extrême des prises de position entre grammaires structurales, transformationnelles, génératives, grammaires de gouvernement et liage, théories de l’optimalité ; les positions varient entre désintérêt et intérêt croissant. Il est inévitable que l’examen des données distributionnelles en vienne à croiser ces prises de positions théoriques ; et nous aurons à nous démarquer avec lucidité et courage, avec honnêteté, de telle ou telle des positions pour lesquelles nous-mêmes avons pu, par le passé, manifester soit intérêt, soit affection ; on ne vise qu’un seul objectif : la description par Séguy 73 a conduit l’analyse linguistique en terrain ferme, sur terre ferme, par des méthodes d’analyse régionale ; toute position qui nous ramènerait au marécage d’hypothèses moins fermes devrait être écartée. Ce sont les processus de liage et de gouvernement bien documentés, fondés sur des distributions irréfutables, vu les conditions de recueil des données (pour Gascogne et Languedoc occidental, voire oriental) qui sont au premier plan de nos préoccupations, en rapport indirect avec le cadre théorique de même nom ; il est certain que nous aurons à nous prononcer sur les processus de dégénérescence observée au niveau des structures phonologiques, morphologiques et syntaxiques : lus particulièrement les provessus dits de dégénérescence syllabique, par rapport aux théories accentuelles qui rendent compte de l’exception de la gallo-romanité ; mais il serait imprudent, du point de vue de la constituance et de l’émergence des grammaires d’états dialectaux, d’isoler ici gallo-romanité de territoire français de la romanité du domaine italo-roman septentrional (territoires vénète, ligure, etc.) ; tout autant d’isoler les états dialectaux aquitaniques pyrénéens N des états dialectaux Pyrénéens S (aragonais, catalan, basque etc.) En second lieu, il nous faut un outillage qui permette d’actionner modèles, théories, et objets, en facilitant l’accès aux cartes distributionnelles, correctement manipulées en mode exploratoire et expérimental : ce qui manquait en effet à nos théorisations, c’est cette dimension expérimentale, totalement libérée, conduite hors des modes, non soumise aux pressions théoriques et modélisatrices de telle ou telle école, tendance, à l’abri aussi bien des errements arithmétiques du passé que de tentations post-modernistes ou modernistes mal contrôlées. Ce n’est donc pas un nouveau départ que nous annonçons, mais un retour : retour aux méthodes de description contrôlée, fondées sur une analyse régionale conytrôlée, sécuritaire, et une analyse linguistique distributionnelle contrôlée, quitte à décevoir tous ceux qui sont alignés sur une ligne de nouveaux départs. Ce retour s’évalue en deux directions contradictoires : fidélité absolue aux données distributionnelles de recueil constitutives de matériau contrôlé, réutilisable sur terre ferme ; infidélité absolue s’il s’agit de données captées, ou à capter, à partir d’actes de communication réels ; et infidélité absolue aux orientations qui fonderaient sur un comput de distances arithmétiques des analyses qui ne répondent ni aus attentes des dialectologues, ni aux attentes des utilisateurs, parce qu’elles relèguent en arrière-plan, par suite d’incompréhension des méthodes exploratoires, la matière même des propriétés des grammaires des états dialectaux. Certes l’outillage qui est encore ici utilisé fait figure de prototype archaïque, dans le champ des bases de données, au plan de la constitution de grands corpus (textes, dictionnaires, atlas) ; mis en place avec le soutien du Conseil Régional de Midi-Pynrénées, ce dispositif général a donné lieu à des opérations de regroupement territorial qui devraient permettre, à terme, le développement d’un plan expérimental améloré que nous appellerons Didascalies dialectales et géolinguistique L’ouvrage vise en premier lieu à traiter les données primaires d’une collection regroupées d’atlas linguistiques : le regroupement est opéré selon le schéma suivant : L’analyse régionale des distributions (P1, P2 M3, V4) consolidée, on en viendra à l’analyse linguistique proprement dite, afin de mettre en évidence une grammaire polylectale des états dialectaux de l’occitan en Aquitaine et Midi-Pyrénées. Drawcarte3 2009 constitue le prototype de base de données relationnelle qui a amorcé les opérations de regroupement, dans une perspective exploratoire. Il faut avoir le courage d’aller jusqu’au bout du dispositif exploratoire ; le courage, mais aussi te temps, les forces, l’énergie. Nul doute que cet instrument puisse donner lieu à un nouveau départ, au prix de l’actionnement des données regroupées dans un tout autre dispositif, dans le cadre des pratiques de l’actionnement dans un dispositif de recherche rajeuni (entreprise, université, Régions, industrie des langues et cultures, en rapport avec nos volontés de donner contenu aux banques numériques de savoirs (BNS) de caractère inter-régional, sur axe B-T-N (Bordeaux, Toulouse, Narbonne), dans un premier temps. Ceci donne un sens prudent - très provisoire - à notre objectif exploratoire des structures du gascon. Si l’outillage reste dramatiquement fruste, c’est pour grande partie en raison même des conditions faites à la recherche scientifique exploratoire dans nos domaines.
SECTION 1. ANALYSE REGIONALE DES STRUCTURES DU GASCON sous la direction de Jean-Louis FOSSAT, avec les contributions successives, pour les méthodes, de Dennis Philps (Philips 1985) de CASANOVA (UTM2, UMS 838 gascon (Casanova et Fossat 2001), de J. Vanpoucke (UPS, IRIT, Toulouse, ADREUC, Carcassonne, Société Image Toulouse), de G. Aurrekpetxea (données basques), de Liliane Jagueneau (données d’oïl (poitevin). Version de synthèse : Fossat 2009 On prend appui sur la cartographie distributionnelle de données gasconnes, réalisée à partir des tables d’ALG6 constituée en banque numérique de savoirs : la réalisation de ces cartes a été faite entre 1996 et 2001 par JL Casanova (UMS 838, UTM2, pour ce qui est des trois volumes accessibles à tous : 1 Phonétique diachronique Z2 Phonologie 3 Morphologie verbale. Malencontreusement, la cartographie des volumes 4 Polymorphisme phonétique 5 morphosyntaxe, n’est pas directement accessible, par suite d’incidents graves, dont il sera question ailleurs. Toutefois, on observe que, dans ce dispositif exploratoire, plusieurs ateliers ont exploré, avec un dispositif similaire, durant les trentee années écoulées, des données externes au gascon, à des fons d’évaluation, de validation d’hypothèses, comme de propositions d’actionnement.
INTRODUCTION : PRINCIPES GENERAUX D’ANALYSE REGIONALE
1.- CARTOGRAPHIE DE KOHONEN ET ANALYSE GEOLINGUISTIQUE DE STRUCTURES Les grammaires de propriétés des états dialectaux s’établissent selon le schéma suivant. Les recherches portent sort sur des unités lexicales isolées, soit sur des bandes sonores : bandes sonores nominales ; bandes sonores verbales ; bandes sonores ou chaînes pronominales. Au départ de toute description, une collection de cartes distributionnelles de propriétés, définies par leur densité (histogramme):
La compétition entre variétés différentielles du gascon, et, si on généralise, de l’occitan, met en jeu un ensemble de propriétés discriminées, selon un principe de séparabilité : - des propriétés phonétiques définies sur des unités dites phones, dans leur environnement syllabique : hauteur, durée, fréquence, densité, gravité, sonorité - des propriétés phonologiques : toutes les syllabes n’ont pas le même poids - des propriétés morphologiques en morphologie concaténative ou substitutive - des propriétés prosodiques et accentuelles - des propriétés syntaxiques définies sur des chaînes, sur des cohortes : on appelle cohortes des suites phonotactiques, prosodiquement et syntactiquement marquées, par exemple les chaînes clitiques des langues romanes. - des propriétés lexicales : ic, ec, oc : (Pr. neutre gascon objet) : nous sommes en présence d’une structure syllabique monosyllabique VC, distincte de la structure faible, fragile V (languecocien, Pr. Neutre) , réduit à on seul élément nucléaire, sans attaque ni coda ; ie sans borne à gauche ni borne à droire. De plus nous sommes en présence d’un flottement distributionnel sur la position N noyau de syllabe, qui fragmente l’espace aquitain septentrional, sans effet sur l’exostence constatée dune structure irréductible à la structure languedocienne.
Références Fossat 2009 Lyon 2 Mémoires et terrains Grammaire de propriétés et clititiques gascons Fossat 2008 (Leeds, Methods) : Jean Séguy protovariationniste Fossat 2008 Colloque international AIEO Aachen : analyse régionale des variétés différentielles de l’occitan :essai d’actionnement dedonnées capturées Sauzet 1983 Syntaxe des clitiques occitans
1. CARTOGRAPHIE DE KOHONEN DE CONSTELLATIONS LEXICALES Le principe est celui de la réduction par fusion en méthode remontante (down-up) Le schéma que nous montront, représente le principe de fusion en fonction d’un certain nombre de connexions sélectionnées : il permet de réduire à minima le nombre d’entrées de surface (FGE) observées dans un index de formes attestées d’atlas lexical phonétique, par exemple pour l’ensemble des vocables qui renvoient à des artefacts (Claval 2006, Ravier 2009) Selon ce schéma, il est possible de réduire à deux représentations réduites une cohorte lexicale de 40, 50, n FGE ou unités d’entrée. Ce qui présente comme intérêt de réduite les risques d’émiettement réels reprochés (Claval 2006). Ainsi, ic, ec, ac, oc, constituent des unités d’entrée lexicale (INPUT) d’un lexique phonétique gascon d’entrée, sans jamais, dans ce cas, de mouvement de labialisation. Il existe des outils pour contraindre ces objets à fusionner, à se regrouper ; pour cela il faut les actionner, pour obtenir, en sortie (OUTPUT), des états à formes dites réduites, en pratiques dérivationnelles.
2. ANALYSE REGIONALE PAR CALCUL DE VOISINAGE, DÉTERMINATION D’HYPERPLANS ET CALCUL D’AMPHIZONES Ces méthodes conviennent particulièrement aux amphizones où la compétition conduit plusieurs systèmes concurrentiels à s’entretuer. 2.1 HYPERPLANS ET AMPHIZONES Les hyperplans définis par les arbres de voisinage sont définis sur des espaces de propriétés phonétiques, phonologiques, prosodiques, morphologiques, syntaxiques. Les deux espaces A et B représentés selon un principe de séparabilité linéaire qui régioit les classifications hiérarchiques établies en mode exploratoire EDA (Fossat 2009 espace des propriétés de clitisation). Les hyperplans présentés ici modélisent les cartes distributionnelles bi-dimensionnelles. En représentation 3D tridimensionnelle, il s’agirait de décrire les mouvements de ces abjets quand ils sont captés dans leurs mouvements interactifs : le dispositif de capture serait alors très facile a réaliser, en environnement industriel.
2.2 TRACE DE FRONTIERE ET SÉPARABILITE EN ANALYSE RÉGIONALE En principe, dans les cas de ce type, on a recours, pour fonder une typologie en analyse régionale, sur des méthodes classiques d’analyse des correspondances multiples (Philips 1985, en environnement ADDAD, VA EDA, Fossat 1988) Les représentations sont statiques et de caractère bi-dimensionnel. Actionnées, les distances entre objets représentés en 3D remettraient en question le tracé statique de frontières (Fossat Leeds 2009). Ceci est déjà visible dans le dispositif proto-expérimental protovariationniste mis en œuvre par Séguy 1973.
3.3. MÉTHODES DE REPRÉSENTATION DU POLYMORPHISME : CONTRAINTES, DEGRES DE LIBERTE, ENSEMBLES DE TRANSITION schémas et cartographie: Fossat-2024
Ces schémas entendent donner une première idée de ce que peut devenir, à terme, et sous conditions, une dialectologie de dialectologues à l’instrument, libérée des technologies anciennes ou modernes, dans le cadre de pratiques d’une théorie de l’actionnement, dans un esprit de fidélité absolue aux données primaires accédées et mises en analyse. Il s’agit principalement ici du polymorphisme structural statique mais la méthode pourrait aussi bien convenir aux représentations du polymorphisme lexical des états dialectaux capturés dans leur dynamique. La figure 1 permet de calculer les classes de voisinage de propriétés gradientes, à partir des données d’un tableau xls6stat (phonétique et phonologie, morphologie, syntaxe) La figure 2 peut rendre compte de l’existence de degrés de cohésion dans les états dialectaux d’ensembles sécants, en représentation statique, ou dynamique.
Bibliographie Dutoit (Henry).- An Introduction to Text-to-speech 3 Collection Texts, Speech and Language Technology Series Editors Nancy Ide and Jean Véronis.- Kluwer Academic Puublishers, 1997. Altmann (Gerry T.M.) editor.- Cognitive Models of Speech Processing. Psycholinguistic and Computational Linguistics. M.I.T, 1990.
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