OCCITAN SONORE NUMERISE: EN DIRECT
Envoyé par: FOSSAT Jean-Louis <fossat@univ-tlse2.fr> (193.55.175.20)
Date: Mercredi, 2 Juin 1999, ˆ 4:03
S'il existe bien un chauvinisme franchouillard, le même chauvinisme pourrait bien être auvergnat, gasconnard, occitanouillant; aussi avons-nous cru utile de préciser quelques unes des positions prises
I. TEXTE DE BASE: déclaration RADIO FRANCE
• du lundi au jeudi de 17h à 18h
• CHANGEMENT DE DECOR
• producteur-coordonnateur : Laurence Bloch
" Rien ne sert de parler théoriquement de la diversité française, il faut la voir et bien la voir de ses yeux, se délecter de ses couleurs, de ses odeurs, la toucher de ses mains, il faut même la manger, la boire à l’auberge authentique. Ce n’est pas seulement l’histoire de France que Michelet, pour parler un instant comme Roland Barthes, mange à belles dents, mais la France elle-même : il n’aura cessé de la parcourir et de s’en nourrir. Lucien Febvre a eu cette même passion sans limite. Je la partage à ma façon. "
" L’Identité de la France" Fernand Braudel
Comment vit-on en France aujourd’hui ? Quels sont les inquiétudes, les rêves, les projets de ceux et celles dont les visages et les paroles ne sortent de l’ombre que le temps d’une tragédie ou d’un fait divers ? Comment s’organise la démocratie locale, se développent les technologies nouvelles, se cicatrisent les blessures des grandes fermetures d’usines des années 70 ? Quels sont les enjeux de l’aménagement du territoire, de l’Europe des régions, des politiques urbaines ? Depuis plus de 10 ans, toutes ces questions étaient au coeur du Pays d’Ici et tout ce qui fut " l’histoire immédiate " des Français fut aussi son histoire : fermeture des chantiers navals de La Ciotat, inauguration du tunnel sous la Manche, colère des marins pêcheurs, grève des " Peugeot ", décentralisation, nouvelles politiques culturelles, aventure des banlieues... Au moment où chaque élection locale enregistre une poussée des votes extrémistes, où l’éclatement des modes de vie traditionnels isole un peu plus l’individu, où le partage du travail semble bien compromis, il est plus urgent que jamais de continuer d’explorer le pays réel, de prendre le temps de l’écouter dans toute sa complexité en dehors des aimables pastels dont on nous abreuve tous les étés, et des sinistres portraits dont on nous assomme dès la rentrée. Car la France est d’abord un pays compliqué, une invraisemblable addition de paysages, de parlers, d’habitudes, une mosaïque infinie de gastronomies locales, de fêtes microscopiques, d’histoires successives... A force de l’arpenter, de l’interroger, de lui tendre sans cesse un miroir, peut-être lui redonnerons-nous " cette intrépide envie de s’aimer sans chauvinisme franchouillard ni nationalisme sectaire " dont rêvait cet été Jean-Claude Guillebaud.
Changement de Décor ausculte la France et ses habitants et ajoute à la vertu du direct celle du documentaire. Certains lieux, certains modes de vie n’ont rien à gagner du direct mais au contraire à y perdre en finesse, en profondeur, en justesse. Vertu du documentaire donc, mais vertu du direct encore: une semaine sur trois, l’émission est totalement réalisée de la province, rejointe en fin de semaine par Conférence de Rédaction, le magazine de la rédaction de France Culture.
II.- AGORA SONORE EN DIRECT : IMAGES SONORES DE LA DIVERSITE OCCITANE Comment parlait-on sur les foires et marchés d’hier, il y a près d’un demi-siècle ? quelle langue était la langue des actes de transaction, de négociation, et plus encore de récit, d’échange, sur les lieux mêmes de l’agora ? A ausculter les pratiques sociales et langagières de la société rurale, quels changements avons-nous pu observer ? Quel a été l’avantage du " direct " pour l’appréhension de la question du pluralisme langagier en France ? Quels ont été les effets induits des grands changements observés : suppression des abattoirs communaux et locaux ; suppression de circuits entiers de foires et marchés, détruits, en vertu d’un changement de décor commandé par la montée des institutions européennes ? Au moment où chaque marché local témoignait d’une poussée de la langue française, où l’éclatement des communautés villageoises s’ajoutait à celui des modes de vie traditionnels, il nous a paru indispensable d’explorer les usages langagiers dans les pays réels, de prendre le temps d’écouter à travers leur complexité les paysans, les négociants, en situation d’échange ; en dehors de l’agréable pastel des terminologies dialectales. Il nous est apparu que la France rurale était en réalité une France “ rurbanisée ”, dont la mosaïque des gastronomies locales, des terminologies locales ne donnait qu’une image tronquée. L’occitan entendu n’était pas du tout une succession, encore moins une addition de paysages sonores: mais un processus de normalité pensé en termes de modèles interculturels. Observer les pratiques langagières en direct avec des méthodes relevant du documentaire, nous a permis de gagner en finesse ; en revanche il était nécessaire de produire hors des conditions du direct, des données qui auraient tout perdu de la prise de son en direct. Jean Séguy avait inventé la méthode indirecte : nous avons dû réinventer le direct à partir du son numérique accédé en stations d’écoute interactive et expérimentale.
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